Le temps, vous connaissez ?



Les jeunes, les moins jeunes et même les vieux comme moi deviennent des junkies de leurs différents écrans: téléphones intelligents, ipads, ordinateurs.

Nous pourrions bien sûr nous rebeller et abandonner tous ces appareils et faire fi de la modernité. Aussi bien aller vivre dans le bois, chasser et faire pousser des légumes.

Mais la réalité est bien plus simple. Nous ne sommes pas esclaves de nos appareils mais bien de la façon dont nous  ajustons les "réglages" des alertes et des notifications.

Ça m'a rappeler un livre que j'ai lu sur le temps voilà près de 25 ans intitulé "Le Tao du Temps". Je l'avais complètement oublié. Mais comme je déménage bientôt, j'ai été faire un petit ménage dans mon entrepôt.

Que de joie à découvrir des dizaines de livres que j'avais complètement oublié.

Et celui-là m'a sauté au visage ? D'ailleurs je me suis sincèrement demandé pourquoi je l'avais envoyé à l'entrepôt ce livre sur le temps. J'ai trouvé la réponse en le relisant, c'est un livre dérangeant qui remets en question notre liberté individuelle. Comme toutes ces alertes et notifications qui nuisent non seulement à notre liberté individuelle mais aussi à notre façon de vivre le temps de notre propre vie.

Le temps, vous connaissez ? Commençons par le temps...

Peu de gens s'interrogent sur le temps. Personne ne nous apprend à l'école à comprendre ou apprendre le temps. Et pourtant le temps n'a pas toujours été le temps que l'on connaît de nos jours.

Dans notre monde moderne, un façon de faire sortir l'individu de son enfance proprement dit, c'est d'apprendre à nos jeunes à mesurer leur vie à l'aide d'un calendrier et d'une montre.

Et après nous passons notre vie à vivre à la surface de ce temps sans trop nous poser de questions. Et pourtant, tout le monde vous dira qu'il manque de temps et que cela crée du stress et de l'anxiété.

Mais rares sont les gens qui se posent des questions plus profondes sur le temps. Qui a inventé le temps tel que nous le connaissons ? Pourquoi ? Est-ce que le temps a toujours été comme ça ?

Difficile en tant qu'adulte de savoir quoi répondre à l'enfant qui vous demande: "Papa, pourquoi nous sommes toujours pressés? ".

Et pourtant il suffit de se rappeler nos dernières vacances où nous avons fit du temps, de la montre et même des plans pour se laisser aller à un temps naturel. On se rappelle à quel point on se sentait bien... Peut-être qu'à ce moment là nous vivions une autre espèce de temps dans le savoir.

Et qui nous dit que ce n'est pas ce temps là qui est le vrai temps et non pas celui qu'on nous a appris à vivre au jour le jour ?

Quelques citations sur le temps pour prendre le temps de réfléchir sur le temps ;-)

  • "Le temps du physicien n'est pas le temps du poète."
  • "En amour, le temps n'existe plus."
  • "Le temps du mystique n'est pas le temps du scientifique."
  • "Je te rejoins dans 5 minutes." mon oeil ;-)
  • "Je n'ai pas le temps de t'aider."
  • "J'aurais bien besoin de temps libre."

Nous sommes des experts pour jouer avec les notions du temps et pourtant nous sommes loin d'être à l'aise de vivre avec lui !

Et pourtant la seule chose qui est égale pour tous dans ce monde, c'est bien le temps. Tout le monde vit 24 heures dans une journée. Et pourtant, nous n'avons jamais la paix intérieure, nous avons toujours l'impression de manquer de temps.

Le problème du temps est loin d'être nouveau et il a déconcerté plein de génies au fils de l'histoire. 

Le temps reste un des plus grands mystères de l'univers. Il est presque impossible de répondre à cette question: "Est-ce que le temps est relié à celui qui le vit ou encore existe-t-il de lui-même ?"

Platon se demandait si le temps était une quantité mesurable constituée de petits moments ou bien une éternité infinie créée antérieurement. Bonne question ;-) Un autre philosophe, Plotin pensait que le temps provenait de l'âme, qu'il tirait sa réalité du mouvement de l'âme dans son passage d'une expérience à une autre.

De tout temps, même à l'âge de bronze où l'on fixait les date des cérémonies à l'aide du ciel, les peuples ont été hanté par la mesure du temps. Les Mayas utilisaient des calendriers très sophistiqués pour organiser leur vie. Nous pouvons dire qu'autrefois les philosophes méditaient sur le temps. Aujourd'hui les scientifiques mesurent le temps, de Einstein à Hawking.

Mais pour nous, au jour le jour, la question est plus simple. Lorsque nous percevons que nous manquons de temps, cela provoque chez nous de la peur, de l'anxiété. Et ça peut même aller jusqu'à la dépression.

Cette peur de manquer de temps vient de notre perception occidentale du temps. Nous voyons le temps comme une flèche qui a été tirée dans l'éternité. Cette flèche voyage à toute allure du présent vers le futur comme une fusée nous donnant le sentiment que le temps file à côté de nous sans que nous ne puissions rien y faire :-(

Et pourtant, il existe d'autres perceptions du temps sur notre belle planète terre. Les vacances dont nous parlions précédemment nous rappelle que même nous pouvons percevoir le temps d'une autre façon.

Le problème de notre façon occidentale d'aborder le temps, c'est qu'elle nous fait entrer dans une spirale d'accélération.

Avec cette façon de percevoir le temps, nous essayons de nous organiser avec une montre, un calendrier et un agenda. Mais en fait nous nous trompons de route. 

Comme bien des gens, au cours de ma vie, j'ai essayé toutes sortes méthodes de gestion du temps et aucune n'a réussi à m'amener à mieux vivre. En fait aucune de ces méthodes n'a résisté au temps si je puis dire xD Bien que toutes ces belles méthodes de gestion du temps se targuent d'augmenter notre compétence et notre efficacité, c'est un mensonge.

Dans notre monde occidental, la plupart du temps, la mesure du succès est souvent reliée à la rapidité. Faire les choses mieux est souvent synonyme de faire les choses plus vites. En acceptant, cette façon de voir, nous entrons dans une spirale d'accélération qui va toujours de plus en plus vite et dont il devient impossible de sortir.

Ça me fait penser à une anecdote dont mon vieux père est la vedette. Mon père est ébéniste de formation et est encore sur le marché du travail à 70 ans. Un jour son patron vient le voir et lui dit qu'il s'était comme disputer avec un autre patron concernant le travail de mon père. Cet autre patron trouvait que les jeunes d'aujourd'hui travaillait beaucoup plus vite que mon père. Et l'autre patron de rétorquer: "peut-être mais le travail de M. Verviers, lui, ne revient jamais à l'atelier." Plus vite n'est pas nécessairement synonyme de mieux bien évidemment, mais nous l'oublions tellement souvent et tellement facilement.

Si nous sommes honnête avec nous-même, notre gestion du temps est toujours axée vers le futur et c'est qui ce nous tient dans la spirale d'accélération. C'est comme si nous avions arrêté de suivre nos propres rythmes intérieurs pour tomber dans un rythme axé sur le futur toujours plus rapide, toujours plus effréné. Peu importe du temps, du nombre d'heures dont on dispose, ce n'est jamais assez et on en manque tout le temps. Nous devenons frustré et insatisfait de notre vie.

Sommes-nous des victimes du temps ? Ou sommes-nous responsables de ce qui nous arrivent, de ce que nous ressentons en nous ? 

Déjà au 20è siècle avec l'apparition des transports rapides, de la télévision, du téléphone, de l'ordinateur; toutes ces inventions nous ont amenés à de moins en moins écouter nos rythmes intérieurs ancestraux. De nos jours, avec nos téléphones intelligents qui ont la puissance d'un ordinateur et qui nous suivent partout sans arrêt, nous traversons la vie en courant tout le temps, en courant toujours vers demain, vers l'avenir. Avec notre  hâte d'accomplir le plus de choses possibles, d'acquérir plein de choses, nous traversons notre vie comme un courant d'air.

Si nous arrêtons un jour pour sentir les fleurs ou regarder le paysage ou pour aimer sincèrement une personne, ce n'est souvent qu'un intermède ou un pause dans notre course folle vers l'avenir.

En fait, nous vivons dans une société qui récompensent souvent les gens qui font les choses sans traîner. Nous tentons par tous les moyens de "gagner" du temps. Comme si c'était possible de gagner du temps ;-(

Et puis viens un jour où un évènement de notre vie nous assomme, nous oblige à ralentir et là nous réalisons que nous courions sans arrêt et que nous avons rempli tous ces espaces de temps que nous pensions avoir récupérer avec nos méthodes de gestion du temps par encore plus de choses à faire.

Plus nous devenons efficace, plus nous allons vite, plus nous remplissons nos journées de choses à faire et moins nous avons de temps pour nous-mêmes, pour notre propre vie à nous.

Certaines personnes intelligentes ont avancé l'hypothèse que ce qui nous rend différent des animaux par exemple, c'est notre capacité à percevoir le temps, à le noter, à le mesurer. Les animaux semble-t-il ne perçoivent pas le temps comme nous pouvons le percevoir et ne sont donc pas en mesure d'imaginer un futur lointain et donc de faire des projets.

Peut-être est-ce vrai ? Mais en échange de cette capacité, nous semblons avoir perdu notre capacité à vivre et à profiter du présent.

Je suis toujours assommé de voir des gens autour de moi se plaindre pendant des semaines qu'ils manquent de temps pour faire ce qu'ils ont à faire et le jour où ils ont du temps parce qu'ils ont terminé ce qu'ils avaient à faire plutôt que prévu, ils s'ennuient et alors il tentent de "tuer le temps" par des conversations futiles sur leur téléphone intelligent par exemple. C'est un peu comme si progressivement, il perdait leur capacité à vivre l'instant pleinement et ainsi perdait par ricochet leur capacité à être heureux.

Comment avons-nous fait pour perdre cette capacité de l'instant présent ? D'où vient cette société dominée par le temps et entièrement tournée vers la réussite et l'efficacité ? À quel moment, l'horloge, la montre ont-ils pris tant d'importance ? Quand est-ce que nous avons perdu notre chemin ?

En fait, vu que tout est relié à la réussite, à l'efficacité, notre gestion du temps est directement reliée au monde du travail. Tout a basculé dans notre échelle de valeur pour placer le travail en position numéro 1 devant la famille et les amis. Beaucoup de monde autour de moi travaille entre 8 et 14 heures par jour et consacre moins d'une heure à leur famille.

Notre travail exige toujours plus de nous créant ainsi des urgences qui nous amènent des tensions et du stress.

L'histoire du temps, vous connaissez ?

En fait le temps contemporain tel que nous le connaissons date de bien plus loin que nous pouvons l'imaginer.

Avant les années 1500, le temps était vu par l'humanité par quelque chose d'organique. Les gens étaient surtout reliés aux rythmes de la nature, le levé et le couché du soleil, les saisons, les marées, etc. Il y avait un temps pour semer et un temps pour récolter.

Après 1500, Copernic vient tout bouleverser en prouvant que la terre n'est pas le centre de l'univers, l'âge de la découverte scientifique était né. D'autres continuèrent à s'interroger sur la vie: Galilée, Bacon et Descartes.

Descartes a véritablement amené un changement dans notre façon de penser et de voir la vie: "Je pense, donc je suis." La réalité se trouva divisée en deux: l'esprit et la matière. Fait intéressant, selon Descartes l'esprit et la matière étaient deux créations de Dieu et ce dernier occupait une grande place dans ses écrits. Mais au fils du temps, cette référence au divin a été abandonnée au fur et à mesure que l'approche cartésienne se développait.

Cette approche amena un gros changement dans notre façon d'envisager le temps.

En effet dans l'approche cartésienne, le monde est comme un machine parfaite qui est gouvernée exclusivement par des lois mathématiques. Le temps n'est plus considéré comme faisant partie de la nature, mais bien comme une force extérieure qui influence le monde, la machine.

Aujourd'hui, avec nos systèmes de gestion du temps, avec nos listes de choses à faire, avec nos agendas, nous subissions toujours les conclusions de cette approche cartésienne.

En fait Descartes avait choisi l'horloge comme modèle pour notre humanité. À cette époque, l'horloge était un bien de luxe réservé aux privilégiés. Le temps n'était pas encore devenu la ressource dont on manque comme aujourd'hui, mais l'horloge elle était un bien précieux et rare. Nous parlons du 18è siècle.

En fait, l'horloge pendule est sûrement la machine clé de l'ère des machines pour son influence sur les inventions de l'époque mais aussi sur la vie des hommes.

Ensuite, tout alla très vite. Newton considérait que "Le temps absolu authentique et mathématique, de lui-même et de par sa nature propre, s'écoule uniformément, sans considération pour l'extérieur." De quoi nous rendre anxieux ;-)

C'est à cette époque que le monde machine s'est mis à remplacer le monde naturel organique et humaniste avec des conséquences funestes qui nous amenés dans nos problèmes d'aujourd'hui comme les changements climatiques. Puisque nous ne considérions plus la terre comme un organisme vivant et nourrissant, nous n'avions plus besoin de la protéger. Nous avons alors perdu notre sentiment de faire partie de la nature et nous nous sommes mis à croire que nous pouvions la manipuler et la contrôler. Le planète terre est devenue un monde machine à nos yeux. Et cette façon de faire est devenue une caractéristique de notre monde moderne occidentale. Le temps était totalement devenu extérieur à nous, c'était devenu une espèce de force que nous pouvions exploiter, utiliser.

Et puis est venue l'ère industrielle qui a fini par nous imposer encore plus cette notion de temps extérieur et linéaire.

Au 18è siècle, c'est encore la vision cyclique du temps qui prévalait malgré la pendule. Le monde était axé sur le travail et non le temps. Peu importe le temps que cela prenait pour ensemencer le champ, ce qui était important était de l'ensemencer. Soit, le temps comptait un peu, mais c'était davantage la quantité de travail qui était importante.

Et puis sont apparues plein de machines. Au début, le temps suivait encore le cycle agraire. On travaillait du lever au coucher du soleil et moins longtemps l'hiver que l'été.

Et puis vers 1850, tout se transforma. On a commencé à coordonner entre elles les étapes du travail. Les différentes tâches d'un travail ont été mises en ordre et devaient maintenant être faites en tant de temps. Ce n'était plus le travail lui-même qui était important mais bien plus le temps que cela prenait pour le faire. C'est à cette époque que les horloges ont envahis plusieurs pays avec les cloches et les carillons qui allaient avec.

Et 1876 fut un date fatidique pour bien des gens, la compagnie de Thomas Seth inventa...... le réveil matin programmable :-( On ne se réveilla plus jamais de la même façon.

Tout ça pour illustrer que notre notion rectiligne du temps que nous vivons aujourd'hui date de très loin.

Mais il a d'autres façon de voir le temps, comme par exemple pour les amérindiens, le temps était cyclique et était un éternel recommencement comme pour les saisons par exemple. Cette façon de voir le temps me semble plus sécurisante et moins anxiogène. Et pourtant, même si les impôts reviennent à chaque année, nous avons perdu cette notion de temps cyclique ;-)








Références:

Le Tao du Temps, Diana Hunt et Pam Hait, 1990

http://www.amazon.fr/Le-Tao-temps-nouvelle-philosophie/dp/2729603492

Un des meilleurs livre que j'ai lu sur la compréhension du temps et sur la façon de mieux le vivre dans notre vie.

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LE JUNKIE MODERNE

Les têtes baissées visionnant les écrans de téléphones intelligents deviennent monnaie plus que courante

PIERRE-YVES MCSWEEN


http://plus.lapresse.ca/screens/1857e25a-c8d7-4580-9dbb-fda3d5d96f47%7C_0.html

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TEMPS CYCLIQUE TEMPS LINÉAIRE Matthieu GUI EKWA
http://www.fss.ulaval.ca/cms_recherche/upload/aspectssociologiques/fichiers/guiekwa1995.pdf



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